Les dieux sont tombés sur la tête. Pendant qu’il fait plus de 12 degrés au Québec en mars, eh! bien! ici au Mexique, il neige!!! Vous avez bien lu. À la télé, nous voyons des images de tempête de neige au nord du Mexique, dans les montagnes. Résultat: sur la côte, le ciel reste plombé de nuages, et évidemment, Chaac, notre cher dieu de la pluie n’en peut plus de se retenir alors il ouvre les vannes et on goûte à une super averse le jour de notre départ de Veracruz.
Ça avait pourtant bien commencé, du moins jusqu’à La Antigua à une trentaine de kilomètres. Cette petite ville pittoresque est le premier site où les Espagnols se sont installés au Mexique et on peut encore y voir les restes de la maison de Hernan Cortès, à côté de la petite église. Mais au moment où nous en repartons, ça y est, le ciel nous tombe dessus à grande trombe d’eau et c’est sous un véritable déluge que nous faisons les 75 kilomètres suivants. Comme nous roulons sur une autoroute, il y a un accotement, mais il est littéralement inondé et laissez moi vous dire qu’un énorme camion à double-remorque qui vous passe à côté, ça vous complète la douche à l’eau sale, garanti!
Imaginez l’allure que nous avions à notre arrivée à Palma Sola: dégouttants dans tous les sens du mot! Nous laissions de grandes flaques boueuses partout sur les tuiles blanches du joli hôtel que nous avions repéré via internet. Dieu merci, le personnel a été compréhensif. On devait faire pitié je pense…
Faut croire que le soleil a eu son mot à dire car nous avons eu un peu de répit les jours suivants. Si bien que nous découvrons enfin le bord du golfe du Mexique à son meilleur dans la zone de la Costa Esmeralda. Il est agréable de s’arrêter dans un petit motel près d’une jolie plage avant de repartir vers l’intérieur du pays où nous voulons faire un arrêt à Papantla dont on nous a dit du bien.
Sur la route, une voiture nous double et nous entendons des cris d’encouragements puis, quelques minutes plus tard, voilà qu’ils se sont arrêtés pour nous attendre! C’est avec plaisir que nous reconnaissons un groupe de touristes français que nous avions croisés à Veracruz. Encore une fois, nous avons droit à une séance photo de groupe et hop! nous repartons pour Papantla où nous faisons une petite pause d’une journée, tellement la ville a du charme.
Comme nous sommes arrivés un dimanche, nous avons la chance d’assister au spectacle des Voladores. Ce sont des danseurs volants! Je vous explique. Un immense mât se dresse devant l’église. D’abord, un musicien y grimpe, et s’installe sur une petite plate-forme au sommet. Puis 4 hommes y montent aussi, et enroulent un grand câble pour chacun d’eux. Au bout d’un moment, voilà que les quatre se jettent dans le vide, suspendus à leur corde qui se déroule lentement pour venir les déposer en douceur au sol, après qu’ils aient fait chacun 52 tours du mât. Cette danse traditionnelle se veut une demande au dieu totonaque…de la pluie!!! Oui, oui, nous comprenons que l’eau est absolument nécessaire pour les récoltes dans un pays comme le Mexique, mais disons que nous apprécions un peu moins les ‘dommages collatéraux’, lire, rendre la vie misérable à de pauvres cyclotouristes!
Heureusement, le temps de passer à travers la région des oranges, le soleil veut bien se pointer encore de temps en temps. C’est le temps de la récolte et on aperçoit les cueilleurs avec leur panier. D’énormes camions chargés de déchets d’oranges pressées nous dépassent et on hume le parfum qui s’en dégage pendant que nos pneus collent dans le jus qui tombe sur la route. Amusant! À Alamo, nous attirons l’attention de bien du monde, qui posent un tas de questions et qui veulent une photo avec nous, tout ça avec le sourire. Décidément, nous faisons sensation un peu partout dans les petites villes du pays!
Mais faut croire que les Voladores ont été efficaces car le lendemain, le ciel reste plombé de nuages, et le temps s’est rafraichi. Finalement, juste au moment où nous allons nous engager sur le pont menant à Tampico, ça y est, l’orage éclate! En moins de deux, nous voilà trempés jusqu’aux os, et en plus, le pont est plutôt à pic pour surplomber le rio Panuco. Ça a été toute une ondée, si bien que les rues de Tampico sont inondées et nous roulons environ une dizaine de kilomètres dans plusieurs pouces d’eau sale pour arriver à Miramar, la fameuse plage de la ville. Nous avons échappé de peu à la grêle semble-t-il. En effet, le sable est criblé de petits trous!
Après un arrêt lunch dans un modeste resto, le temps de nous sécher un peu, nous décidons de tenter notre chance dans un hôtel du type ‘resort’, avec accès à la plage. Pourquoi pas, puisqu’on annonce (enfin!) du beau temps les jours suivants. Bingo! l’hôtel a un tarif raisonnable, et le lendemain, c’est sous un soleil radieux que nous découvrons la magnifique plage de Miramar: 10 kilomètres de beau sable blond bordant les eaux turquoises du Golfe du Mexique!
En fin d’après-midi, après une longue promenade sur le Malecon, alors que nous prenons un verre sur la terrasse près de la piscine, le propriétaire de l’hôtel nous salue gentiment et nous demande d’où nous venons. Quand il apprend que nous sommes à vélo, le voilà intéressé par notre voyage et il nous propose son aide pour planifier le reste du trajet vers le nord. Quand nous lui faisons part de notre projet d’itinéraire, il se dit préoccupé pour notre sécurité…
Hum! pas la première fois qu’on nous dit qu’il y a des risques sur les routes du Tamaulipas, en fait, quasiment tout le monde nous déconseille d’y rouler! Nous faisons un petit blitz d’informations sur le web et ce qu’on y lit donne froid dans le dos. En effet, le jour où nous sommes arrivés à Tampico, il y a eu pas moins de 7 morts violentes en quelques heures à Ciudad Victoria, une des prochaines villes sur l’itinéraire! C’est sans compter tous les autres incidents rapportés un peu partout dans la région. Plusieurs sont des règlements de compte entre gangs de narcos trafiquants, mais il y des « victimes innocentes »…au mauvais endroit au mauvais moment? Au nord de Tampico, il y aurait actuellement une recrudescence de violence, si bien que la police est sur un pied de guerre en prévision de la période de vacances commençant le 18 mars prochain.
Donc le lendemain, quand Eliseo, le propriétaire de l’hôtel nous appelle à notre chambre pour nous proposer des options, nous sommes toute ouïe. Il nous offre même de rester une nuit de plus (à ses frais!), afin de bien penser à notre affaire! Il a aussi appelé 2 journaux différents, qui veulent nous interviewer!! Alors nous voilà à raconter notre aventure à vélo aux journalistes, puis nous acceptons avec gratitude l’offre si généreuse d’Eliseo. Cela nous donne le temps de bien profiter de la plage et nous allons aussi faire un tour à vélo au coeur de Tampico qui nous parait pas mal plus invitante sous le soleil!
Finalement, nous nous rendons à l’évidence. La solution la plus prudente est de prendre un autobus direct pour parcourir les quelques 500 kilomètres jusqu’à Reynosa à la frontière avec les États-Unis. Eliseo nous organise tout: il achète les billets, vient nous reconduire au terminal d’autobus, et s’assure que nous sommes bien installés dans la section VIP du bus. Fait amusant: quand nous montons à bord, un homme nous reconnait car il vient de lire les journaux du matin où nous avons l’honneur de figurer et il veut une photo avec nous. En effet, notre histoire a intéressé les journalistes et ils ont rédigé un excellent compte-rendu de notre aventure dans les deux principaux quotidiens de Tampico. Flatteur!
Ce n’est pas sans un petit pincement au coeur que nous écourtons d’une dizaine de jours notre séjour au Mexique, mais belle consolation que cette rencontre avec Eliseo et sa famille. Nous avons encore une fois réalisé à quel point les gens d’un pays peuvent nous faire aimer leur terre par la chaleur et la spontanéité de leur accueil. Il est bien dommage que ces gangs violents créent autant d’insécurité dans le nord et l’ouest du pays, mais partout ailleurs où nous sommes passés, jamais nous ne nous sommes sentis menacés de quelque façon que ce soit. Au contraire, les Mexicains nous ont conquis complètement et ce qui est sûr, c’est que nous reviendrons dans ce pays superbe qui a tant à offrir. Hasta pronto Mexico!
Notre trajet en bus dure un long 7 heures, mais nous arrivons sans encombre à Reynosa tout près de la frontière. Oh! il y a bien eu un ‘arrêt de sécurité’ un moment donné: des militaires armés jusqu’aux dents nous font descendre et ils vident les soutes et passent tous les bagages aux rayons X, à la recherche d’armes semble-t-il. Pas trop souriants les gars, plutôt expéditifs, mais on peut comprendre qu’ils prennent leur ‘job’ au sérieux…
Bon! nous voilà à la frontière, et il est plus de 19 heures (20 heures, car l’heure change aux USA!) quand les vélos sont remontés, il fait noir…que faisons-nous? Reynosa n’est pas une ville recommandable à la nuit tombée, alors vaut mieux traverser aux États-Unis au plus tôt. Heureusement pour nous, ça se passe bien, le poste frontière est tout près. Nous n’avons qu’un ‘gros’ 5 kilomètres à rouler avant de trouver un motel pas trop mal en terre américaine. Il est tout de même passé 23 heures quand nous avalons avec appétit la pizza commandée à la chambre, puis c’est le dodo bien mérité après cette longue journée en autobus…et 5 kilomètres de vélo à la noirceur!
Nous voilà maintenant au Texas, sur de longues routes…plates où seul le vent capricieux risque de rendre le trajet plus difficile. Avec une semaine d’avance sur notre itinéraire, ça nous laisse plus de temps pour profiter de la côte texane vers Corpus Christi…si la météo peut être de notre bord!!!
À suivre…